Il est dix-sept heures ! après 7 heures de broderie, je rentre au gîte de Mme Bertha Gardebien.
Devant la maison un curiste de 73 ans fait des mots fléchés, un couple avec une fillette rentrent de promenade, arrivent deux randonneuses parties la veille du Maïdo . Elles avaient dormi dans un gîte à Marla avant de passer le Taïbit pour descendre à Cilaos. La plus jeune était infirmière à Mayotte et sa maman l’avait rejointe et toutes deux venaient faire un séjour de 10 jours à la Réunion.
L’histoire de ma logeuse
Cette petite dame souvent vêtue d’une robe mauve a accroché dans l’entrée un diplôme attestant qu’elle avait bien été au Cap Nord. Alors, je lui ai demandé si elle voyageait souvent et si elle parlait l’anglais. Elle m’a dit tout de go : « Moi, je suis une illettrée, je n’étais à l’école que jusqu’à l’âge de 9 ans. » A Ilet à Cordes, où elle est née, elle devait aider aux champs, semer et récolter les lentilles, pour la famille puis aider le voisinage pour les mêmes tâches. Sa maman brodait pour avoir un petit appoint. Ils élevaient aussi leur volaille.
Son époux travaillait dans le bâtiment : il partait deux semaines et ne rentrait qu’un week-end sur deux. Pendant ce temps, elle élevait ses enfants, tenait la maison. Puis elle a géré le gîte toute seule. Et grâce à cette activité, elle a pu participer à de nombreux voyages organisés : au Brésil, aux Etats – Unis, en Espagne. Celui qui lui a le plus plu était celui qui l’avait conduite au Canada, au Québec ! Son époux n’avait pas le temps de voyager, mais il l’a accompagné les dernières années. Aujourd’hui, elle vit seule dans le gîte mais accueille souvent ses enfants et ses petits enfants.
Il paraît qu’elle était une de premières habitantes de Cilaos à gérer un gîte. Aujourd’hui il en existe une dizaine (en comptant Bras Sec et Ilet à Cordes)
Capacité de ce "gîte de France 1 épi"
Il peut accueillir trois couples et une personne seule. La salle de bain et les toilettes sont communes. Les chambres sont étroites mais les sanitaires sont très propres.
Jardin et varangue
Il est situé à deux pas du centre ville, au n°50 rue Saint Louis. Un arrêt de bus de trouve devant maison et dans la rue parallèle. En face le snack "Chez Nénesse" où on peut manger à condition de réserver. Vue sur le Grand Bénard, le Piton ds Neiges,
devant le gîte
Un dîner d’échanges intéressant
Nous avons tous mangé ensemble le soir et Mma Gardebien née Tossam nous avait préparé un dîner succulent : gratin de potiron puis carry de bœuf et tarte aux pommes. Le tout arrosé d’un bordeaux. Punch en apéro et rhum arrangé au faham et écorce d’orange ou rhum arrangé aux fraises de bois.
Le monsieur âgé qui faisait sa cure nous a raconté qu’il était veuf depuis 40 ans, qu’il était retraité de la boulangerie depuis 15 ans et qu’il était originaire de Saint André. Habitant actuellement à Sainte Marie, il est venu en VSL à Cilaos et fait une cure de 3 semaines (de 8 heures à 10 heures du matin) Fatigué, il a quitté la table vers 19 heures.
Nous autres avons encore discuté jusqu’à 22 heures. Ainsi j’ai appris par la jeune randonneuse, infirmière à Mayotte, qu’il valait mieux visiter Mayotte en avril – mai, parce qu’en juillet et août soufflent les alizées. Le couple de Saint Denis qui avait réservé le gîte pour une semaine regrette de devoir habiter le chef-lieu qui n’est pas très attractif. L’homme est pédopsychiatre et travaille en relation avec l’hôpital de Saint Paul et son épouse travaille pour la prévention et de la sécurité dans le domaine commercial : elle en connaissait un rayon sur la taille des entreprises et le lobby automobile. Selon elle, il n’existe sur l’île que trois grosses entreprises : Ravatte, Caillé et les Chinois (ces derniers ne donnent pas le nom à leur entreprise) . La Réunion est le troisième département en ce concerne l’impôt sur les grandes fortunes.
La maman de la jeune randonneuse a raconté le désenchantement de sa deuxième fille , responsable chez Manpower. Elle avait été formatée pour trouver des CDI aux demandeurs d’emplois et elle gagnait plus de 2500 euros et depuis la crise, à cause de délocalisation, son salaire est tombé à 1500 euros (elle ne touche plus de primes car elle n’arrive plus à placer les candidats au travail.) Pourtant sa mère l’avait mise en garde sur les limites du système capitaliste enseigné dans les écoles de commerce.