| Chère Jacqueline,
Voici une description de nos repas et moments traditionnels de fêtes de fin d'année. Evidemment, il sera difficile de ne pas tomber dans la nostalgie du bon vieux temps, néanmoins beaucoup de ces traditions ont finalement assez bien perduré.
Encore une fois, partons de l'agriculture. La "fin de la coupe "marquait la clôture d'une période de travail pénible et intense, mais elle signifiait aussi un revenu déterminant dans les budgets familiaux. Laissons à part les aspects économiques évidents pour se concentrer sur les rythmes familiaux festifs. Le tissu socio-ethnique de notre île marque évidemment la façon de vivre les fêtes de fin d'année, toutefois des traits communs sont perceptibles comme la dimension religieuse. Il y a deux ou trois générations, le moment marquant était la période de décembre-janvier et plus précisément de Noël aux deux premières semaines de janvier. En fonction des religions suivies, la façon de fêter était différente, par exemple les Tamouls de confession hindoue marquaient une période de carême juste à ce moment. Noël est longtemps resté une fête religieuse avec pour point d'orgue la messe de minuit. Pour plusieurs raisons, le repas n'était pas celui du réveillon mais celui du lendemain midi. Historiquement, les repas de Noël étaient surtout fêtés par les responsables administratifs de la Colonie qui avaient la nostalgie de leur pays. La tradition de la dinde en est directement issue, tout comme celle du sapin et de la crèche. Mais il ne faut se tromper sur l'impact que cela suppose pour la population locale. Immédiatement, la volonté d'adopter ce modèle est venue et ça a été bien vécu. Le seul obstacle était d'ordre financier, la plupart des familles ne pouvaient se permettre deux fêtes aussi onéreuses en une période aussi courte (Noël et jour de l'An). Toutefois, les familles de la bourgeoisie commerciale urbaine et des grandes propriétés cannières ont d'emblée adopté cette tradition du repas de Noël. C'était une occasion de réunir la famille, de faire les comptes et bilans et de distribuer les bénéfices comptables. Les entreprises étant familiales, ça faisait un tout avec l'opportunité d'un repas pantagruélique. Les repas étaient particulièrement riches et combinaient les plats locaux et français: salade de palmistes issues des propriétés, galantine de porcs et volailles, dinde et/ou poissons (parfois bichiques, mais surtout les beaux "rouges" pays), desserts à base de sucre (n'oublions pas que les grandes familles en produisaient avec leurs usines) et bien sûr le vin fraîchement importé par bateau pour l'occasion. Amicalement
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