Le crabier à l’œuvre
Jeudi matin, un oiseau était en sentinelle sur les rochers face à l’océan à Grands Bois. Il guettait tranquillement depuis son perchoir. Puis bientôt, il s’est approché de nous et nous l’avons regardé avancer discrètement sur ses pattes jaunes qui contrastaient avec le noir de la roche volcanique.
On avait l’impression qu’il baissait la tête, qu’il la rentrait dans les épaules pour ne pas se faire remarquer. Presque "aplati", il descendait vers l’eau, son long bec pointu toujours à l’horizontale. C’est le dessin de son plumage qui m’a le plus fascinée.
Pendant de longues minutes, j’ai observé son manège, et bientôt il a disparu derrière un rocher, plus moyen de le voir… Je l’ai laissé vaquer à ses occupations. Cet oiseau se nourrit d’insectes, de batraciens, de poissons…
En revoyant les photos, et en les agrandissant, j’ai pu l’identifier facilement avec le secours du « Grand Livre de la Réunion » de la collection « Orphie ».
Là, j’ai redécouvert certains aspects de sa morphologie, notamment la tête noire métallique pourvue de longues plumes occipitales descendant sur le cou, sa moustache noire, son œil jaune. Il s’agit du « héron strié » encore appelé « crabier » ou « poule sultane ». Son nom scientifique est « butorides striatus », raison pour laquelle on l’appelle très souvent « butor ». Ce terme est devenu le nom d’un quartier à l’entrée de Saint Joseph, zone où devait autrefois nicher ce bel oiseau. Il paraît que l’espèce est rarement observée à la Réunion.
Heureusement que le bord de mer de Grands Bois est encore sauvage à maints endroits, c’est peut-être grâce à cela qu’il doit nicher dans le secteur : son nid de branches est posé à 2 ou 3 mètres du sol ou de l’eau dans un buisson épais, proche de la rive, il pond deux, trois œufs bleu vert. Comme il aime les filaos, les faux poivriers, les bambous, il doit être comblé à Grands Bois. Pourvu qu’on n’ait pas l’idée de détruire ce biotope avec tous les projets de construction… En 2005 il existait une quarantaine d’individus à la Réunion. Peut-être moins aujourd’hui …