Comment ne pas parler de la Fin de la Coupe qui est un moment crucial à la Réunion ? Gérard Moutien, un des lecteurs du blog, très bien renseigné sur le sujet, a bien voulu en parler ici…
Voilà donc l’éclairage du spécialiste, qui, dans le texte suivant, démontre que le rythme agricole cannier a un impact sur la vie économique, politique et socio-culturelle de l'île.
Coupe de la canne à la Ravine des Cabris près du Chemin Stéphane
"Sur le plan économique…
La coupe dure 6 mois. C'est la seule période où un planteur reçoit un revenu de son exploitation cannière. Le début ou la fin de la coupe sont donc des moments cruciaux sur le plan financier. Les échéances des prêts, taxes et cotisations sont calculées sur ce calendrier.
Au-delà des aspects logistiques des exploitations (salaires des coupeurs et journaliers, engrais, herbicides, gas-oil,...) c'est surtout une entrée financière après six mois à vide.
Concernant les aides agricoles cannières, les dates de démarrage et de fin de coupe sont déterminantes. Elles sont les compteurs qui décideront du rythme des versements des aides. Les aides économiques et les aides à la production sont versées par tranches justement déterminées par lesdites dates (le nombre de semaines de coupe effective a son importance dans le calcul). Les échéances de contrats saisonniers (conducteurs d'engins agricoles, cachalots, ou postes ouvriers dans les usines du Gol et Bois-Rouge) dépendent de ces dates. Elles sont décidées par des Commissions Mixtes d'Usines où siègent à égalité planteurs et usiniers. Autrefois, c'était un bras de fer. Actuellement, les usiniers décident bien souvent unilatéralement avant de convoquer la commission.
Coupe de la canne près de Terre Sainte
Sur le plan politique….
La fin de la coupe rythme aussi la vie politique de notre pays. Le réseau agricole planteur est l'un des mieux constitués et des plus actifs. Il est particulièrement sollicité en inter-campagne (au sens agricole et électoral du mot). Evidemment, les grandes lignes sont visibles: CGPER (Jean-Yves Minatchy) est plutôt à gauche et la FDSEA (Frédéric Vienne)/ Jeunes Agriculteurs sont plutôt à droite. Mais depuis une dizaine d'années les lignes de partage migrent fortement, il y a de plus en plus de préoccupations sociales à la FDSEA/JA et de plus en plus d'approches économiques à la CGPER. Le tout s'explique par un accroissement de la taille moyenne des exploitations et simultanément la baisse du nombre de planteurs. Finalement, on se dirige vers une paysannerie moyenne que tous les syndicats et partis font de leur mieux pour défendre. L'apparition d'une paysannerie (comme corps social, politique et économique) est une nouveauté à La Réunion, historiquement le monde agricole était essentiellement partagé entre très petites exploitations (souvent également ouvriers agricoles) et grands domaines.
Grosso modo, la fin de la coupe est propice au début des meetings électoraux (comme l'a montré ce dimanche 13 un certain nombre de partis politiques pour les élections régionales). "
Le prochain article sera consacré au plan culturel et social de la coupe… toujours grâce aux informations de Gérard.